Repas à la cantine
Avec tout ce qu’on entend, de la bouche des enfants, à propos de la cantine, je voulais me rendre compte par moi-même de ce qu’il en était vraiment. J’ai donc mangé avec eux ce midi.
Tout d’abord, à midi, quand la sonnerie retentit, les 4 accompagnatrices (Eminé, Zakia, Zohra et Corinne) doivent gérer le flux des enfants. Car à ce moment-là, ça part dans tous les sens… vers les toilettes, vers les lavabos, vers les salles de restauration. Mais tout se fait dans le silence absolu (non, je rigole !).
Une fois ces détails logistiques réglés (ou qu’on croit réglés), les enfants passent à table. Mais là, entre ceux qui ont oublié de se laver les mains, les 15 copains qui veulent manger ensemble à une table de 8, ceux qui souhaitent manger avec une accompagnatrice mais pas l’autre, ceux qui viennent manger avec des cartes ou des petites voitures, ou ceux qui amènent un sac à table, il y a encore du tri avant d’aller s’asseoir.
Une fois tout le monde installé, un chef de table est désigné…. Comme beaucoup veulent être chef de table mais qu’il n’y en a qu’un par table, c’est un peu la guerre mais les accompagnatrices ont vite fait de calmer le jeu et les esprits.
Je n’ai pas choisi le jour de ma venue en fonction du menu, mais il a l’air appétissant :
Quand les cantinières amènent les pastèques par plateaux de 8 ou 10 parts, les chefs de table ont pour mission de servir les personnes assises avec lui.
Il y a ceux qui adorent et qui veulent la part du copain, ceux qui n’aiment pas, ceux qui n’aiment pas mais qui ne veulent pas goûter, ceux qui sont allergiques et pensent s’en sortir ainsi (à midi, j’ai vu des enfants qui étaient allergiques à tout sauf au pain !), mais au final, moi je mange ma part. C’est plus sympa avec les doigts mais comme les accompagnatrices demandent de manger avec les couverts, je me plie aussi à cette demande… mais bon, vu l’état de certains après avoir mangé leur pastèque avec un couteau et une fourchette, je n’ose imaginer la tête de certains tee-shirts si les enfants avaient mangé avec leurs doigts.
Pour l’eau, chacun se sert avec la cruche de la table, que le chef de table va remplir quand elle est vide. Je n’ai pas vu un seul verre renversé, et je vous avoue que je ne sais pas comment ça a pu se faire ! Il y avait des verres qui servaient de longue-vue, d’autres de coquillages plaqués contre l’oreille pour entendre la mer, d’autres encore qui tournaient sur la table comme des toupies. J’ai regardé discrètement quel âge j’avais, au fond du mien, mais ce ne sont pas les verres que j’avais quand moi, enfant, je mangeais à la cantine.
Les pommes rissolées et l’omelette sont bien passées, en règle générale. Le fromage aussi. Pour ce qui est de la tarte à la rhubarbe, quand chacun a su ce qu’était la rhubarbe, tout le monde a au moins goûté. Il y avait les amateurs de croûte (comme moi) et les anti-trottoir (ils ne savent pas ce qui est bon). Les tartes, excellentes du reste, ont fait un tabac. Même certains qui n’aimaient pas avant ont appris à l’apprécier et ont demandé à en reprendre.
A la fin du repas, le chef de table débarrasse et nettoie également la table. Ce qui est étonnant, c’est que tous veulent être chef de table mais beaucoup m’ont avoué qu’ils n’aiment pas mettre ou débarrasser la table à la maison. Certainement le terme de « chef » qui les motive ici…
Pour ce qui est de l’ambiance, c’est comment dire, bruyant. En fait, les accompagnatrices demandent aux enfants de se taire quand ça devient trop bruyant, mais quand deux se taisent, il y en a trois qui reprennent de plus belle. Et encore, si ce n’était que des chuchotements ! Les enfants parlant fort, les voisins de table sont obligés de parler encore plus fort pour se faire entendre. Les accompagnatrices étant 2 pour 28 enfants, dans ma salle, difficile pour elles d’être partout à la fois.
De plus, elles doivent aussi s’assurer que les enfants goûtent au moins à la nourriture, que certains ne prennent pas deux parts au détriment du copain. Elles doivent aussi demander aux enfants de rester en place sur leur chaise car il y en a qui se lèvent, d’autres qui sont assis à l’envers sur leur chaise (et encore, ils sont assis eux !), d’autres qui sortent des jouets de leur poche…
Parfois, quand un enfant trouve que la cantine est trop bruyante, il lève le bras. A ce moment, tout le monde doit lever le bras et se taire… Ca fonctionne très bien, ça fait du bien aux oreilles, mais ça fait mal au bras J. Une fois le silence, on peut reposer le bras… et le repas reprend… le bruit aussi d’ailleurs.
Il suffit d’un petit groupe de 3-4 enfants pour entrainer les autres. Et encore, m’a-t-on dit, les plus turbulents n’étaient pas là ! Ca promet ! Ce qui m’a le plus surpris et qui m’a fait souhaiter bon courage à Zohra et ses collègues, c’est la façon dont certains enfants leur répondaient insolemment. Vraiment aucun respect ! C’est une minorité, certes, mais j’avoue que rien que ça m’a fait penser que ça ne devait pas être facile tous les jours pour elles. Et même certains qui semblent sages comme des images ne se privent pas de leur faire comprendre qu’elles ne sont pas leurs parents.
Le repas quant à lui était vraiment bon, j’ai trouvé. Par rapport à ce que j’avais pu entendre, j’ai été très agréablement surpris. Peut-être ne suis-je pas difficile, mais franchement, rien à redire sur les quantités et la qualité.
Je suis reparti de la cantine en me disant que les enfants y mangent bien, très bien même, mais aussi que les 4 accompagnatrices ont vraiment beaucoup de travail le midi. Elles font le maximum, et sans ça, ce serait insupportable.
En tous cas merci à Marjorie Ding pour m’avoir permis de venir partager ce moment avec les enfants et les accompagnatrices.
Expérience à retenter, mais avec un appareil photo la prochaine fois.